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Assisses organiques Pebble Rubble (Moroso / Silvera)

16.7.2024

Les Designer’s Days se prennent au jeu

Un chef-d’œuvre de la peinture dissimulé derrière un canapé, des meubles transformés en pions sur un damier géant, un décor évoquant les jeux numériques… Avec la thématique « jeu », qui servi de fil rouge aux scénographies des différents showrooms partenaires, les Designer’s Days 2024 ont renoué avec l’état d’esprit de l’imagination au pouvoir, qui a fait le succès de leurs plus belles éditions passées. FRANCOIS SALANNE

Les Designer’s Days repartent de l’avant. C’est ce qu’il est permis de penser, après une édition 2024 au programme consistant, qui s’est déroulée du 29 mai au 1er juin dernier dans une vingtaine de showrooms de design de la capitale. Après avoir été mise en sommeil pendant cinq années, la manifestation a renoué avec son ADN d’origine : faire desdits showrooms des lieux de création éphémères, pour faire la promotion du design auprès des professionnels du secteur – designers, architectes d’intérieur, distributeurs, prescripteurs – mais aussi auprès du grand public. En 2023, l’Association des Designer’s Days et son nouveau président Thierry Guérin - à la tête de Dedar France, marque italienne de tissu d’ameublement - et sous la présidence d’honneur d’Alain Lardet, l’initiateur du mouvement, ont relancé ce parcours de création, dans un format plus réduit, qui réunit désormais une vingtaine de marques, éditeurs et manufactures du périmètre Saint-Germain-des-Prés. On y trouve des marques de mobilier bien sûr, mais aussi d’électroménager et de tissu d’ameublement, avec une forte tonalité internationale, toutes situées sur le segment de marché du haut-de-gamme.

Showroom Molteni&C.

Thematique « Jeu » et partenariat avec les Arts Decoratifs

Cette édition 2024 a été marquée par le retour d’une thématique – « Jeu » ! – qui est comme un fil rouge permettant aux participants d’imaginer une scénographie originale pour présenter leurs produits. Une thématique aux multiples lectures et entrées, qui s’est traduite par des jeux d’expression lors des conférences, des jeux de matières, des jeux de formes, des jeux de styles, ou encore des jeux de lumières ou jeux d’esprit pour les objets… avec, pour toile de fond, les Jeux Olympiques qui s’annoncent. Pour permettre un échange de points de vue, et alimenter l’événement sur le plan des idées, une conférence a eu lieu le 31 mai à la mairie du VIIème arrondissement sur le thème « Le je(u) est-il sérieux ? », avec le concours du Mobilier National. Autre nouveauté de cette édition, le partenariat artistique établi avec l’École des Arts Décoratifs, dont le but est de créer un dialogue fertile entre éditeurs et jeunes designers diplômés, qui a été proposé tout au long du parcours, sous la forme de quinze expositions - Design Objet, Design Textile et Matière, Design Graphique ou encore Design Vêtement… - organisées dans les showrooms sous la houlette de la société de production artistique Arter, qui a également élaboré une nouvelle communication graphique. Enfin, les Designer’s Days ont perpétué leur contenu de convivialité, en déclinant leurs fameux cocktails où se rencontrent éditeurs, designers, professionnels et amateurs de design.

La Joconde dissimulée derrière le canapé Augusto (Molteni&C).

Molteni&C : le plus ludique

Parmi la vingtaine de participants, celui qui a le plus « joué le jeu » si on peut dire, est peut-être le fabricant italien Molteni&C, en donnant la parole au designer Ron Gilad, réputé pour remettre en question son point de vue et mettre à jour de nouveaux aspects intrigants, en donnant à son travail une dimension ludique. En prenant pour base deux modèles emblématiques de la collection – Teorema, une de ses propres créations, un rangement qui explore le concept de vide avec des éléments rotatifs, et le canapé Augusto, dessiné par Vincent van der Duysen – le designer a imaginé une installation où l’art, le design et l’humour font bon ménage. En jouant sur le mot « gioco » - qui signifie « jeu » en italien – qui est aussi le début de « Gioconda » - la Joconde en français – le visiteur était invité à un jeu de cache - cache entre le fameux portrait de Léonard de Vinci en partie dissimulé derrière le canapé, et une boîte de sauce tomate, émergeant du rangement Teorema, qui est précisément l’ingrédient dont se sont servis des militants écologistes pour asperger le tableau le plus célèbre du monde, heureusement protégé par une vitre… Une sorte de jeu de piste, en somme, aux multiples détours, qui en mélangeant la peinture Renaissance, le pop art à la Andy Warhol et les interrogations écologiques, amène à y associer par le regard le contenu créatif des meubles de la marque, en parfaite ligne avec les principes des Designer’s Days.

Rangement totem Teorema (Molteni&C).

Poliform : damer le pion a ses concurrents !

Marque phare du design italien, disposant d’un showroom très en vue rue du Bac en partenariat avec le distributeur Silvera, Poliform a choisi de jouer « le jeu de l’élégance », en exposant en exclusivité les nouveautés de sa collection outdoor, joliment présentées sur un sol représentant un damier géant. La marque présente ainsi sa vision d’une habitation raffinée et intemporelle, en l’associant au jeu sophistiqué et stratégique de dames : « La simplicité apparente, l’universalité et le style linéaire de ce passe-temps reflètent l’esprit de la marque, ainsi que le processus de conception soigné à la base de chacune de ses créations. Poliform Paris se transforme ainsi en un grand échiquier, qui captive l’imagination : un tableau à damiers blancs et noirs recouvre les vitrines et les grandes surfaces au sol, conquérant le regard », explique-t-on chez le fabricant. La scénographie crée ainsi une harmonie entre rigueur et douceur, détail et vision d’ensemble, nuances et matériaux… Une alternance équilibrée qui évoque le rythme même des dames, où une composition ordonnée sert de toile de fond à une danse sophistiquée, dans le déplacement des pions entre essentialité et sophistication, pour créer des atmosphères à l’élégance intemporelle. Sur ce damier imaginaire, ont pris place les nouveautés d’extérieur de Poliform : les lignes solides et les volumes généreux de la gamme de sièges rembourrés Ketch, inspirée du nautisme (design Jean-Marie Massaud), ainsi que la monumentalité sculpturale de la table Monolith, accompagnée par la légèreté du matériau des assises Magnolia, deux créations marquantes signées Emmanuel Gallina.

Le showroom Poliform / Silvera, au motif du damier.

Moroso, dans l’univers du jeu numerique

Les designers se sont inspirés de l’univers numérique et de ses jeux sur écran pour leurs créations. Forte de ce postulat, Moroso, l’une des marques les plus créatives du design italien, a rhabillé le showroom Silvera Gribeauval à la manière d’un écran d’ordinateur, en y recréant « l’univers coloré et pop du gamer ». Dans cet univers, le canapé Dolorez de Ron Arad joue un rôle central : son module standard s’inspire d’un pixel, l’unité de base d’une image, pour créer des parallélépipèdes souples, avec une base carrée, disposés et assemblés à différentes hauteurs, pour former un système composable complet et structuré, de même que l’accumulation de pixels donne naissance à une image complète. Un nombre infini de formes et de compositions est ici possible, réunissant le monde du design industriel avec l’approche ouverte et créative de l’art, comme le permet d’espace virtuel numérique. Déjà exprimé par le système de canapé modulaire, nous retrouvons les pixels comme décor mural du showroom, qui se concentrent vers la ligne qui grandit sans cesse en assimilant de nouveaux pixels, connue sous le nom de Snake, amenée à grandir dans un mouvement infini. Moroso et Silvera ont choisi ce décor pour présenter le nouveau canapé Gruuve de Patricia Urquiola, un modèle trois places, également modulaire, dont le profil serpentin évoque la forme de Snake. A l’opposé de ces formes numériques abstraites, l’éditeur a également présenté les canapés et poufs Pebble Rubble (design Front), qui par leurs formes organiques renvoient aux rochers et galets qui ont certainement été les premières assises de nos ancêtres. Une évocation entre abstraction numérique et univers primitif, où la couleur joue un rôle de premier plan, qui emmène le visiteur dans un dépaysement créatif renouant avec le propos originel des Designer’s Days.

Le Canapé Gruuve dans un univers pixelisé (Moroso / Silvera).

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[Zooms]

Un nouveau showroom Zanotta a Paris, pour les 70 ans de la marque

Fondée en 1954 par Aurelio Zanotta, cette marque est devenue au fil des ans une référence du design de l’innovation et de la recherche, à laquelle les plus grands designers conceptuels ont associé leur nom – Achille Castiglioni, Ettore Sottsass, Ross Lovegrove… - et dont les créations figurent aujourd’hui dans les plus grands musées d’art moderne du monde. Ces Designer’s Days ont été l’occasion pour elle d’ouvrir son premier showroom parisien, situé boulevard Saint-Germain, en partenariat avec l’incontournable Silvera. Sur une surface de 180 m² répartie en deux niveaux, la marque a exposé ses nouvelles collections présentées lors de la semaine du design de Milan en avril dernier, des créations de designers internationaux tels que Muller Van Severen, Philippe Malouin, Zaven et Calvi Brambilla, aux côtés d’une sélection de pièces emblématiques de la marque, avec notamment l’innovante assise Sacco, le tabouret Mezzadro et le portemanteau Sciangai, pour n’en citer que quelques-unes. « Avec l’ouverture de ce nouvel espace à Paris, nous sommes ravis d’apporter l’héritage de Zanotta en matière d’excellence du design et d’artisanat au cœur de l’une des villes les plus emblématiques du monde, déclare Luca Fuso, PDG de Zanotta. Ce showroom représente non seulement une célébration de nos 70 ans d’existence, mais aussi un engagement à inspirer et à enrichir la vie des passionnés de design à Paris et ailleurs ». A l’issue de décennies de succès depuis les années 60, la marque a ouvert un nouveau chapitre de son histoire depuis son rachat en 2023 par Cassina, suivi de l’ouverture d’un nouveau flagship à Milan en 2024.

Nouveau showroom Zanotta Paris.

Gaggenau : une invitation a jouer avec les sens

Pour illustrer la thématique du jeu, le fabricant d’électroménager de prestige a invité dans son showroom Verena Brausch, créatrice d’objets d’exception réalisés avec des matériaux sélectionnés comme les marbres rares et les bois les plus recherchés, afin de proposer un voyage dans les jeux de matières et de formes. La scénographie a été déclinée en trois objets marquants de sa collection « Eternel sans temps », produits en série limitée : la table à manger ovale en laiton poli et bois de noyer, qui présente une adéquation parfaite entre la forme et le matériau ; la table d’appoint en bois de noyer et en inox poli, qui incarne quant à elle l'interaction idéale entre les disciplines des matériaux nobles ; et enfin le banc en marbre Carnico et inox, aux magnifiques lignes organiques. La créatrice a par ailleurs choisi le marbre Albanie Rosso pour façonner le vase Wow et le bol Jeu des Sens, des matériaux polis qui sont une invitation au toucher. En résonnance, l’espace multi-sensoriel « The Difference », situé au centre du showroom Gaggenau, permet aux visiteurs de découvrir l’essence de la marque, son histoire et l’importance des matériaux dans son développement et ses innovations. Gaggenau et Verena Brausch partagent ainsi un même engagement pour l’excellence et l’innovation, qui se traduit par leur approche commune du design pour éveiller les sens, en s’appuyant sur des savoir-faire artisanaux ou ancestraux, l’utilisation de matériaux d’exception et une quête perpétuelle de perfection dans le détail.

Table en laiton et noyer (design Verena Brausch). © Joy Forgas Deplanche

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